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Le roman noir français

 Après avoir écrit des romans populaires sous différents pseudonymes (Frank Harding, Léo Latimer, Jean de Selneuves ou Lionel Doucet) Léo Malet cet ancien poète surréaliste, anarchiste et autodidacte publie sous son nom le premier roman noir français 120, rue de la gare (1943) et crée son héros récurrent Nestor Burma . Essai transformé d'acclimatation de la figure du détective américain dans la France d'après-guerre.
Le soleil n'est pas pour nous. Léo MaletIl écrit aussi La vie est dégueulasse (1948), Le soleil n'est pas pour nous (1949) puis Sueur aux tripes (1969) formant ainsi sa trilogie noire.
Il retrouve Burma en 1954 et entame les Nouveaux mystères de Paris en quinze volumes pour autant d'arrondissements de Paris (il manque toujours les VIIème, XIème, XVIIIème, XIXème et XXème que Malet trouve défigurés par les promoteurs).
Egalement a explorer : son Journal secret (1997).

 C'est dans la droite lignée d'Irish que l'on trouve le Frédéric Dard d'avant San Antonio. Dans des romans tels que Délivrez-nous du mal, Toi le venin, Le monte-charge, L'homme de l'avenue, Le dos au mur, Les salauds vont en enfer ou Coma, il jongle avec le noir et fait circuler l'angoisse.
Après avoir tâté de l'espionnage très 50 sur fond de nouvelles armes nucléaires secrètes (Dernière mission, Les brigades de la peur ou La mort en laisse parus sous le mon de Frédéric Charles), il laisse la place à San Antonio et à sa folie verbale : Laissez tomber la fille (1950) sont les premières aventures du commissaire San Antonio. Les huîtres me font bailler, Le pétomane ne répond plus, Béru contre San Antonio ou La queue en trompette sont à découvrir (dans leur genre !).

 Duo au raffinement infernal, grands théoriciens du genre, auteurs d'intrigues qui se resserrent comme un étau sur la victime, Pierre Boileau et Thomas Narcejac Sueurs froides. Boileau-Narcejacnous entraînent dans des romans où le quotidien se dérègle. Leur première collaboration est un succès (ils considèrent L'ombre et la proie paru sous le pseudonyme d'Alain Bouccarèje comme une maquette), Celle qui n'était plus (1952) est immédiatement adapté au cinéma (Les diaboliques) par Henri-georges Clouzot.
Suivront D'entre les morts (1954) (adapté au cinéma par Hitchcock sous le titre de Vertigo/ Sueurs froides), Les louves (1955), Les victimes (1964) (roman qui comme son nom l'indique assez bien, déroule son intrigue en partant du point de vue de la victime)...

 Alain Demouzon, c'est l'auteur de la pluie, du gris muraille et des mots de monsieur tout le monde ou l'art du roman d'atmosphère. Même s'il reste un peu inclassable, il aborde le noir avec Un coup pourri (1977) d'où sort le détective Nicolas Placard et Adieu ma jolla (1978) titre hommage à Chandler. Il nous ballade dans le XIIIème arrondissement de Paris dans Château-des-rentiers (1982) sur les recommandations (en préface) de Léo Malet.
Avec Quidam (1980), il penche vers le néo-polar...
Egalement à découvrir Mes crimes imparfaits (1978), Prix du Mystère de la Critique.

 Jean Amila (pseudo de Jean Meckert) entre lui dans la série Noire sur une commande qu'il signe John Amila. Y'a pas de bon dieu (1950), dans la tradition des grands espaces américains. Dans Les loups dans la bergerie, Noces de soufre, Jusqu'à plus soif ou Langes radieux, il attaque la glorification des truands et du monde du crime.
Avec La lune d'Omaha, un petit bijou noir (son roman préféré), il règle ses comptes avec la guerre.
Dans la mouvance post mai 68, il crée l'OP Edouard Magne alias Geronimo flic hippie « au service des victimes et pas au service de la puissance » (Le grillon enragé, La nef des dingues, Contest-flic, Terminus Iéna...). Bref, Amila est un humaniste, libertaire et pacifiste qui conteste et le fait plutôt pas mal, frayant lui aussi avec le néo-polar.

 Georges J. Arnaud (le J. Est ajouté pour qu'on ne le confonde pas avec Le rat de la conciergeriel'auteur du Salaire de la peur) a tout essayé du roman populaire à l'érotisme, en passant par la science fiction, l'espionnage (où il se défend) et dernièrement le polar historique (L'homme au fiacre, Le rat de la conciergerie...). Soit plus de 400 romans sous une bonne quinzaine de pseudonymes différents.
C'est en 1954, sous le nom de Saint-Gilles qu'il signe son premier roman noir Ne tirez pas sur l'inspecteur (qui lui vaut le Prix du Quai des Orfèvres).
A partir des années 60, il signe de son nom (Georges J. Arnaud) des romans noirs plein de gens englués dans un quotidien banal soudainement menacé (Le cœur froid, Je ne vivrais plus jamais seule, Tel un fantôme, Noël au chaud...). Il signe ensuite quelques polars engagés contre les multinationales ( La tête dans le sable, Bunker parano, Plein la vue, Brûlez-les tous...) ou la CIA sa bête noire (Les fossoyeurs de la liberté, Président-pourriture...)
Le coucou (1978) est sans doute son meilleur livre...

 Sans oublier,
 Pierre Siniac et ses histoires de fou : dans Charenton non-stop chaque fois Les monte-en-l'air sont là!que le totaliseur kilométrique affiche 317 km un crime est commis. L'affreux joujou l'appareil photo qui développe des clichés du passé... ou Les morfalous (1968), Les monte en l'air sont là (1970) un casse impossible sur un piton rocheux, Aime le maudit (1980) l'histoire d'un club très étrange...ou Femmes blafardes (1981)


 Francis Ryck qui fait souffler le vent de la contestation sur la Série Noire et invente la plupart des thèmes de la génération suivante. A lui tout seul il fait basculer le roman noir français dans le néo-polar, éclatant les codes du genre. On retiendra après son entrée dans la Série Noire en 1966 Prière de se pencher au dehors, Drôle de pistolet, Le compagnon indésirable, Chasseur de sable, Les heures ouvrables ou Fissure.

 La nuit des grands chiens malades d'A.D.G (1972), Le grand môme (1977), parodie du Grand Meaulnes d'Alain Fournier (son homonyme !) ou L'otage est sans pitié.

 Raf Vallet (Jean Laborde de son vrai nom) dénonce l'affairisme pompidolien par Mort d'un pourri et Adieu poulet.
Ces derniers annonçant presque un nouveau roman noir français.