|
 Affaire de femmes
Le polar est un genre littéraire en prise avec son époque
et qui en reflète les évolutions. La part belle est donc faite aux femmes
qui arrivent en force depuis une vingtaine d'années.
Il faut dire que les petites anglaises avaient ouvert la
voie : Daphné du Maurier (Rébecca,
Ma cousine Rachel, Le vol du faucon...) et bien sûr Agatha
Christie (Une mystérieuse affaire de style, son premier
roman datant de 1920). Mais l'évolution de la place des femmes dans le
polar ne se limite pas au nombre.
Les nouvelles reines du crime so british cisèlent leur
style, fouillent la psychologie de leurs personnages (un superintendant
qui fait de la poésie...) et étoffent leurs intrigues :
P.D.James, Sans les mains, Un certain
goût pour la mort, L'île des morts, La proie pour l'ombre, A visage
couvert, Meurtres en soutane...
Ruth Rendell Le goût du risque,
Simisola, L'homme à la tortue (adapté au cinéma par Almodovar, En
chair et en os), Véra va mourir, Regent's Park...
Lynda La Plante, ancienne actrice,
scénariste et productrice de télévision débute en novélisant un de ses
scenarii (The Widows, suspect n°1) puis se lance pour de bon :
Coup de froid, Sang froid...
Minette Walters fait une entrée fracassante dans
l'univers du crime avec des romans à suspens jouant avec la complexité des
rapports humains dont Chambre froide et Cuisine
sanglante (Edgar Poe Award du meilleur roman 1994).
 Ellis Peters quant à elle, part explorer
les couloirs du temps (en plein Moyen Age) et se rend célèbre avec le
frère Cadfael ancien croisé reconverti dans la vie monacale et la
résolution d'énigmes criminelles. Le premier est un Trafic de
reliques en 1997. Egalement : Un cadavre de trop, La foire de
Saint-Pierre, Un bénédictin pas ordinaire...
Anne Perry s'engouffre elle dans l'ère
victorienne (L'étrangleur de Cater street, Rutland place, Un étranger
dans la maison...)
Aux Etats Unis, Charlotte Armstrong construit
des romans aux atmosphères troubles, aux
machinations diaboliques : Merci pour le chocolat, La folle berceuse
(Troublez-moi ce soir au cinéma pour Marilyne Monroe) et des
nouvelles également remarquées : Mort d'un chien, prix Ellery
Queen's Mystery Magazine, meilleures histoires de suspense
d'Hitchcock.
Patricia Cornwell débute comme
chroniqueuse judiciaire ou informaticienne au cabinet d'un médecin
légiste, métiers qui lui fourniront la matière première de ses livres à
l'univers très réaliste. Avec Post mortem (1990) naît Kay
Scarpetta et une suite sur le thème serial killer et médecine légale :
Mémoires mortes, Et il ne restera que poussière, Une peine
d'exception, Séquence des corps... (ensuite ça décline un
peu)
Avant de jeter Mary Higgins Clark et son
abondante production (un roman à Noël et un pour la plage) nous nous
arrêterons sur La nuit de renard (grand prix de littérature
policière en 1980) et La clinique du docteur H.
Donna Léon, auteur de polars dont la
véritable vedette, le principal protagoniste est ...Venise et ses
langueurs. Un vénitien anonyme, Mort en terre étrangère, Mort à la
Fenice...
 Last but not least, la très littéraire Patricia
Highsmith, ses idées géniales (L'inconnu
du Nord-express adapté au cinéma par Hitchcock) et son très
séduisant mais très ambigu Monsieur
Ripley, assassin et faussaire (Plein Soleil de René
Clément au cinéma), Ripley et les ombres, Ripley s'amuse et
Sur le pas de Ripley. Mais aussi Patricia Highsmith essayiste
avec L'art du suspense (bonne théorie du genre).
En France aussi le courant charrie des figures du genre :
Brigitte Aubert s'adonne ainsi au roman
noir (Requiem Caraïbe) ou au roman à suspense (Les quatre
fils du docteur March) serial killisant dans la pure tradition
anglo-saxonne.
Andréa H.Japp (française comme peut de
choses l'indiquent dans son univers) se fait également remarquer,
rivalisant elle aussi avec les américains sur leur propre terrain. La
Bostonienne (Prix du Festival de Cognac, 1991), La femelle de
l'espèce (1996) ou La parabole du tueur. Des serial killers
et leur univers trouble jusqu'à l'obsession.
Plus proche de l'exception française, Fred
Vargas (son prénom accolé au nom du personnage d'Ava Gardner dans
"La comtesse aux pieds nus"), archéologue médiéviste de formation,
délaisse la violence, construit des énigmes à partir " d'un rien " et préfère explorer avec minutie des
personnages décalés ( le contemplatif commissaire Jean-Baptiste Adamsberg,
un préhistorien, un médiéviste, un spécialiste de 14-18...) dans un
univers entre quotidien et histoire : Les jeux de l'amour et de la
mort (1986), Ceux qui vont mourir le saluent (1994),
Debout les morts (1995, Prix du Maine Libre 1995 et Prix mystère
de la critique 1996), L'homme aux cercles bleus (1996, Prix du
festival de Saint-Nazaire), Un peu plus loin sur la droite
(1996), Pars vite et reviens tard (2002)...
Maud Tabachnick, ancienne kinésithérapeute
dont l'enfance est fortement marquée par la guerre (une partie de sa
famille meurt en déportation) place d'emblée le racisme, la violence, les
fanatismes de tout poil sont au centre de son œuvre, qui débute en 1990
avec La Vie à fleur de terre. En 1994, avec Un été
pourri les romans de Maud Tabachnick déménagent aux Etats Unis (parce
que selon elle c'est un pays où tout peut arriver) et installent Sam
Goodman, lieutenant de la brigade criminelle, et Sandra Khan, journaliste
homosexuelle qui vient de perdre sa compagne assassinée, ses deux héros
fétiches. Suivent : Le Festin de l'Araignée, Gémeaux, Le tango des
assassins, Cinquième jour...
C'est aussi
Hélène Couturier, ex-rédactrice de pub,
journaliste et réalisatrice de documentaires, première française admise
dans la collection
Rivages/noir avec Fils de femme en 1996 (l'histoire de
détrousseurs de passeurs de drogue dans un aéroport parisien dont le flair
est mis en défaut...).
Depuis 1996, Brigitte Kernel anime
l'émission Noctilune sur France Inter. Elle y raconte des histoires à et
avec ses auditeurs. Exquis cadavres en est un recueil bien noir
(même si le style est parfois inégal...). Elle a également écrit deux
polars : Un animal à vif, paru au Masque en 2001 et
Autobiographie d'une tueuse, l'univers d'Eugénie Grandet, 82
ans.
Nadine Monfils, Une petite douceur
meurtrière publié dans la
Série Noire en 1995. La population d'un bourg endormi secoué par
une série de kidnappings, de chantages, de messages anonymes, puis de
meurtres... Naîtra ensuite le commissaire Léon, le flic qui tricote
(bof ! A part peut-être Bonjour chez vous ! dans l'univers de la
série télé Le prisonnier).
Alix de Saint-André, L'ange et le
réservoir de liquide à freins (1998)
|
|